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Ils existent je les ai rencontré(e)s
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6 août 2019

La lettre

    

 

 

 

Dimanche, ils ont déjeuné ensemble au restaurant, un bistrot de quartier. Frères et soeur

Le soir, l'aîné lui a téléphoné. L'aîné celui qui a un syndrome d’Alzheimer.

Ce soir il est lucide, il parle de ses peurs de ses angoisses, de la terreur de se voir partir, de savoir qu'il part, qu'il ne reviendra pas. Toutes ses douleurs toutes ses peurs il les étale, trop c'est trop, il sort de la bulle du déni. Il sort pour quelques instants de l'oubli, pendant quelques minutes il ne sombre plus, une pause il se souvient. Il sait. Lui qui oublie le début d'une conversation, là rien n'est oublié. Tous les deux ils savent que c'est une pause.

 

Une pause douloureuse violente. Il écoute il comprend. P as simple, mais il sait, il sait qu'il faut se taire, juste être là dire je sais, « oui je sais tu pars », rien d'autre.

Le temps est long le moment est long, ce soir,l'aîné n'est pas dans la redite, dans la répétition, simplement il sait. Il parle sans le dire de ce qu'il sait de ce qu'il sent. Encore et encore, juste pour le dire pour dire sans le paraître toutes ses détresses. Le frère lui est là. A l fin ils pleurent tous les deux ils savent que c'est un de leurs derniers vrais moments, que bientôt ils se perdront à jamais, non pas par la mort, par l'oubli.

Il sait que bientôt il ne saura plus qui il est. Ils pleurent. Les larmes partagées l'apaisent. Le frère le laisse parler, écoute, c'est tout. Que faire d'autre ? Et quand apaisé il raccroche.

Lui bouleversé encore appelle l'autre frère.

« Il ne sait plus ce qu'il a dit, ce qu'il sait, c'est qu'il c'est fait engueuler

« Tu n'as pas à me dire ce que je dois faire »

Il craque, il a tort il le sait mais il craque

« Tu n'es qu'un connard ! » Il raccroche. Pour reprendre le téléphone aussitôt

« Tu n'e qu'un connard, je n'ai plus de frère »

Dans la colère il va plus loin encore, trop loin bien sûr. Il écrit un mail.

Ne vient pas à mon enterrement. Si je meurt avant toi, tous plus de 60 ans, elle rôde la mort. Normal.

Il appelle sa sœur, toujours bouleversé, il dit ce qu'il a fait ce qu'il a dit.

Soupçonneuse, la sœur demande »Tu vas bien ? ».

Il ne répond pas, il a compris elle ne comprend pas, ou ne veux pas comprendre.

Déchiré il reste seul avec le poids.

 

Quelques jours plus tard, il écrit.

Au frère à la sœur.

Il dit.

Au frère « je m'excuse de ce que j'ai dit ».

Voilà, je prends le large. Je pars, je m'éloigne. Je reviendrai ou pas, vous m'accepterez ou pas c'est votre droit, mais j'ai besoin de silence. Je pars.

Il dit la génération d'avant suinte encore, j'en ai assez. »

Ne m'écrivez pas.

Bien sûr sa demande n'est pas respectée et il reçoit une lettre de la sœur.

Avec dedans toutes les pointes, les soupçons les suspicions qu'il souhaite fuir. Tout ce qui depuis si longtemps pèse sur sa vie, mais il ne le sait pas encore, en tout cas pas à quel point.

Aux sous entendus, aux fausses vérités, à la fausse compassion il ne répond que par le même message.

 

Reconnaissant avoir eu tort de s'emporter, mais réclamant la paix le silence.

Mais la sœur ne lâche rien, elle veut avoir raison, à tout prix, elle qui sait si bien tout de tout.

Avoir le dernier mot à tout prix à n'importe quel prix.

« Ne m'écris pas. » Ce que lui demande elle le lui retourne le lui jette à la figure.

 

 

 

 

Mais il est loin maintenant, juste, bien que bouleversé par ce qu'il vient de choisir.

Les matins sont paisibles, plus d'inquiétudes inexpliquées, d'angoisses certains matins.

Il se réveille calme, serein, Des obstacles étaient là qui deviennent petits cailloux sur sa route.

 

Il reste des questions pourquoi ne pas l'avoir fait avant, pourquoi avoir accepter de revenir il y a vingt ans, alors qu'il avait coupé les liens. Un appel de sa sœur, « les parents vont mal » il était revenu, il regrette aujourd'hui.

 

Il ne sait pas, il cherche comment cela pouvait-il peser à ce point, par où passait les humeurs sombres, les faiblesses de cette famille. Il sait que quand il a juré contre son frère il a eu tort, il sait qu'il était redevenu comme eux le temps d'un soir, ce que sa sœur a nommé « son état pas normal »

Il sent que rien ne sert à rien, quoiqu'il dise fasse, il sera toujours « le pas normal »

La cause est entendue. Et bien qu'il pense à tout ça avec des doutes, chaque matin chaque réveil bêtement calme, lui prouve qu'il a bien fait.

Il reste à chercher comment cela pesait si lourdement.

 

Il pourrait décortiquer les mots de la sœur, mais pour quoi ? Pour de nouveau être pris dans cette toile empoisonnée qui s'appelle «La Famille !».

Peu importe ce qu'ils vont penser. Il c'est tu tellement souvent tellement longtemps par faiblesse, lui qui passait pour le « fou » de la famille. Il ne disait rien. P

Pourquoi d'ailleurs ? Ne pas être seul, être accepté par eux qui ne voulaient ne veulent pas de lui, pas comme il est. Maintenant son silence est le retour de sa dignité, il aimerait trouver un mot moins pompeux, mais là il ne trouve pas. Pour le moment

 

 

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